FRANCE LUTTE ANTI CORRUPTION : 1-UNE RÉVOLUTION DE PALAIS

Publié le par LOUISE DE LOU

LE RAPPORT ALARMISTE DE L'OCDE DU 23 OCTOBRE 2013 CONCERNANT LA FRANCE.

Le rapport de l'OCDE contre la Corruption en matière de renforcement des mesures fiscales et de lutte contre la corruption des agents publics étrangers ainsi que ses recommandations était "émis" en pâture le 23 octobre 2013 et affiché à la face d'un monde qui se devrait incorruptible . Il avait fait grand bruit du côté français . En effet la vénérable institution internationale n'avait pas été tendre avec la France, un de ses États membres qui a d'ailleurs ratifié sa Convention le 17 décembre 1997 portant notamment sur la corruption transnationale de ses agents étrangers lors des transactions commerciales . En effet dans ce Rapport dit de phase 3 (voir mes articles antérieurs sur la Corruption) le groupe de travail de l'OCDE composé de nombreux experts dont des membres du GRECO ( Groupe d'États) et du GAFI ( Groupe d'Actions Financières) tirait la sonnette d'alarme concernant le "manque de réactivité", la trop grande "frilosité" voire "la retenue excessive virant à l'immobilisme" de la France en matière du traitement judiciaire à l'égard des transactions commerciales des nombreuses entreprises françaises composant le stratus économique et social. De plus l'OCDE nourrissait quelque suspicion à l'égard de l'indépendance du parquet dont le procureur reste toujours aujourd'hui nommé par décret du Président de la République , a seul l'opportunité des poursuites et donc le quasi monopôle du déclenchement des poursuites . Pour l'OCDE cette situation renvoie " à quelques possibilités d'interventions du Garde des Sceaux dans les procédures par le biais de circulaires mais encore d'interventions individuelles". Même inquiétude pour la Cour Européenne des Droits de l'Homme et du Citoyen dan son Arrêt Medvedev et de la Cour de Cassation dans son Arrêt du 23/11/2010 qui stipulait" que du fait de leur statut les membres du Ministère public en France ne remplissent pas l'exigence d'indépendance à l'égard de l'exécutif qui compte parmi les garanties inhérentes à la notion d'autonomie du magistrat instructeur. Plus prosaïquement il y a dans l'hexagone trop peu de procédures traitées alliées à des enquêtes souvent carencées. En effet en douze ans, seul le groupe SAFRAN était inquiétée pour une affaire de corruption incluant des " pots de vin" impliquant des agents étrangers.

RAPPEL DE SES PRÉCONISATIONS.

Au vu de ce bilan peu glorieux, l'OCDE qui avait adopté le 9 décembre 2009 la Recommandation du Conseil visant à renforcer la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, demandait à la France " d'intensifier" davantage son combat dans sa lutte contre la corruption des agents publics étrangers et de s'aligner sur une série de mesures visant à pallier à cet état de délitement institutionnel. Pour l' OCDE, il s'agissait "d'accroître la confiscation des profits tirés de la Corruption, de supprimer le principe de déductibilité fiscale des pots de vin versés aux agents étrangers notamment dans les DOM TOM et protectorats et que les sociétés et filiales discriminées se soumettent à leur responsabilité pénale". De plus l'Institution internationale demandait la " suppression pure et simple de la notion d'élimination de l'exigence de réciprocité d'incrimination tout comme le régime dérogatoire interdisant aux victimes de corruption transnationale de se constituer partie civile mais encore le relèvement du coût maximum des amendes visant la notion d'Abus de Biens Sociaux ( ABS) , une plus grande indépendance du parquet ainsi qu'une réforme du statut financier de son parquet. De même l'OCDE préconisait un plus grand recours à la procédure de comparution sur recommandation préalable de culpabilité ou CRPC et ce dans le but d'une totale indépendance d'avec le pouvoir politique et d'en rendre public certains éléments tel le " secret défense".

L'ALIGNEMENT FRANÇAIS SUR LA CONVENTION : UNE VÉRITABLE NÉCESSITÉ

Piquée au vif la France se devait de réagir efficacement anticipant quelque peu le verdict peu flatteur qui s'annonçait . Aussi la feuille de route présidentielle était elle donnée et la Loi du 11 octobre 2013 portant sur le renforcement des moyens de lutte contre la corruption contre la délinquance économique et financière et les paradis fiscaux était votée au nom de " la transparence de la vie publique ". S'ensuivait la loi organique relative au blanchiment et à la création du parquet national financier adoptée le 5 novembre 2013 , promulguée le 6 décembre 2013 et publiée au JO le 7 portant par le fait même la circulaire du 30/11/2014. Ainsi le 1er février 2014 était porté sur les fonds baptismaux judiciaires le nouveau Parquet Financier ( voir mon article sur LEX_DE_LOUISE ) installé par le Procureur Général Falletti de la Cour d'Appel de Paris le 3 mars 2014 qui sera en charge désormais de bon nombre d'affaires de délinquance économique astucieuse et présidé par son procureur Éliane Houlette.

Mais il faut reconnaître que trois ans après le Rapport de l'OCDE , une déclaration de son Groupe de travail datée du 23 octobre 2014 stipulait que la France avance quand même à pas lents et feutrés en matière de détection et d'instruction de ses procédures judiciaires notamment en matière de corruption d'agents publics étrangers. Car bien que le groupe OCDE ait constaté depuis "des avancées significatives comme la création du Parquet national financier, la suppression d'instructions individuelles du Ministre de la Justice au Parquet, la protection généralisée des lanceurs d'alerte , la possibilité donnée aux associations de lutte contre la corruption de se constituer partie civile ainsi que l'augmentation substantielles des sanctions pénales pour l'infraction de corruption active d'agent public étranger", l'Hexagone traîne encore des pieds quant à l'application des 33 Recommandations émises par l'OCDE dont seules 4 mises en oeuvre ont été enclenchées, 17 partiellement et 12 non mises en oeuvre. Si des projets de loi et loi ont été votées et qu'il semble qu'il y ait plus d'enquêtes et de poursuites pénales, la France n'a pas opéré de changement notoire et majeur en matière de sa politique pénale devant assurer notamment l'indépendance de la Justice vis-à-vis de l'Exécutif et tant promise par l'ex Garde des Sceaux, Christiane Taubira. De plus rien n'a été fait en ce qui concerne le fameux "secret défense" et la " loi de blocage" s'y rapportant. Pas d'avantage en ce qui concerne l'incrimination du trafic d'influence international et de la réforme du délai de prescription de l'action publique à l'infraction de corruption transnationale. En 2014 l'OCDE constatait tristement qu'aucune entreprise française ne faisait l'objet de condamnation pour des faits de corruption transnationale pourtant caractérisés et avérés et surtout prononcés à l'étranger contre les dites sociétés incriminées.

Pourtant au sommet de Londres du 12 mai dernier organisé par David Cameron qui souhaite "lutter contre l'argent sale provenant notamment du secteur de l'immobilier en Grande Bretagne " et tant raillé par les ONG et activistes qui qualifiaient Londres " de la plus grosse lessiveuse du monde avec ses 36 000 propriétés détenues par des sociétés off shores" , la France était doublement représentée en les personnes du Ministre de l'Économie Michel Sapin et de Christine Lagarde, " patronne" du FMI. Puis le 7 juin dernier donnant le La à la partition anti-corruption qui devait faire de ce mois de juin une véritable fête de la musique anti-corruptive à l'OCDE, bon nombre de journalistes économiques français se pressaient à ses ateliers sur le sujet et présidés par Nicola Bonucci, respectivement directeur juridique et Patrick Moulette , chef de division du service anti-corruption à l'OCDE. Des questions fondamentales y étaient ainsi débattues comme "comment lutter contre l'infraction de corruption transnationale" en reprenant en postulat de base les tenants et les aboutissants de la Convention. Laquelle a été signée par les 41 États membres en 2016 dont 95 multinationales sur 100 non financières et qui, mises bout à bout, représentent 64% de l'économie mondiale et plus de 50% des exportations . Car n'oublions pas que depuis plus de 17 ans, la Convention constitue le véritable outil voire le coeur de la section anti corruption de l'OCDE qui rythme le tempo de tous ceux qui luttent contre cette gangrère internationale sévissant dans tous les États dont certains finissent par être labellisés de non droit. Cette dernière permet de qualifier et quantifier les fraudes au sein des sociétés en matière d'investissements commerciaux et permet de réguler ainsi le bon fonctionnement de l'attribution des marchés notamment en matières d'appel d'offres dans le secteur de la construction, de la Défense , des médicaments ou des infrastructures hydrauliques et électriques. La Convention est signée par les États membres qui doivent alors respecter scrupuleusement les normes mises en vigueur par l'Institution internationale à travers un Network de 4 phases ( voir mon article sur le rapport OCDE sur LEX_DE-LOUISE ) où des experts pointus passent à la loupe le stratus économique et judiciaire des États membres concernés. Des phases allant de l'examen par les pairs , experts et surtout par le Groupe de travail "du cadre juridique et des lois d'applications" (Phase 1) en passant par celui de la "mise en oeuvre législative de la Convention et l'examen du suivi par le groupe OCDE " ( Phase 2) , puis par " l'étude avec examen par le groupe OCDE des questions relatives à l'action répressive et des questions horizontales" ( Phases 3 et 4 ).

Ainsi aujourd'hui l'OCDE a produit pas moins de 195 rapports relatifs à la corruption transnationales et les pratiques et activités répressives des 41 États parties et a préconisé pas moins de 1450 recommandations visant à améliorer les législations anti-corruption et l'action répressive malgré le fait qu'on puisse lui reprocher d'avoir bannie la liste noire pour la transformer en une liste grise uniforme où s'enchevêtrent les mauvais résultats des très mauvais élèves . Toutefois un guide de bonnes pratiques pour les contrôles internes , la déontologie et la conformité a été même adopté le 18 février 2010 .

Aujourd'hui l'OCDE tisse sa toile en matière de programme de prévention, de lutte et d'aides contre la Corruption. Ainsi le réseau anti corruption s'est-il élargi notamment en Europe orientale et en Asie Centrale ( ACN). Il en va de même dans le Pacifique ainsi que dans les relations établies entre l'OCDE et la Banque africaine de développement pour l'intégrité des affaires et de lutte contre la corruption en Afrique ainsi que celles développées en Amérique Latine avec le Chili, , l'argentine, le Brésil la Colombie et le Mexique.

LOUISE DE LOU

( suite: LUTTE ANTI-CORRUPTION: 2- UNE RÉVOLUTION DE PALAIS MAIS L'AFFAIRE DE TOUS....DE LA FRANCE AU CHILI....)

Publié dans DROIT

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